samedi 14 juin 2025

BANK MYNA – Eimuria

 


BANK MYNA – Eimuria

Medication Time Records / Araki Records / Stellar frequencies records

 

Il y a des disques qui ne se livrent pas tout de suite. Des disques qui réclament qu’on les déguste, qui réclament du silence autour, une pièce à soi, et une écoute feutrée. Eimuria, deuxième album de Bank Myna, fait partie de ceux-là. Un disque à la croisée du post-rock, du doom et de l’ambient, qui nous entraîne lentement dans un monde à la beauté vertigineuse et inquiétante.

Ce qui frappe d'abord, c’est l’atmosphère. Elle est dense et brumeuse. Je pense à Chelsea Wolfe pour le goût des tensions et les montées en puissance, à Anna Von Hausswolff pour le côté mystique, ou encore à Emma Ruth Rundle et Julie Christmas pour la capacité à faire frissonner. Mais Bank Myna a vraiment son propre style.

 

Seulement cinq titres mais près de cinquante minutes, les morceaux sont donc longs, patiemment construits. Chacun est un voyage, une embardée, No Ocean of Thoughts ouvre dans une lente dérive, et prend son temps pour s’installer, puis The Shadowed Body s’étale sur près de treize minutes avec une belle basse et des guitares inquiétantes. Le point culminant se situe sur Burn All the Edges, vraiment mystique, aux touches ethniques dans les sonorités mais aussi le chant de Maud qui devient tour à tour aérien puis incantatoire, il est le fil conducteur de ce voyage sonore. Sa voix n’habite pas seulement la musique : elle la hante.

 

J’avais déjà beaucoup aimé Volaverunt (leur premier album) qui explorait déjà ce côté sombre, Eimuria s’y enfonce encore plus profondément. C’est un album encore plus dense et plus riche. Chaque écoute devient un voyage, jamais exactement le même.

 

On sort de Eimuria un peu transformé, comme vidé puis rempli différemment. C’est un disque qui transporte, fait voyager. Un disque comme de grands artistes peuvent produire. Bank Myna est un groupe français, de Paris et il est tout aussi grand !

 

 

J. NeWSovski

 

 

https://bankmyna.bandcamp.com/album/eimuria

https://www.facebook.com/bankmyna/



lundi 9 juin 2025

PROPAGANDHI – At Peace

 


PROPAGANDHI – At Peace

Epitaph

 

 

Voici certainement l’album le plus clivant de l’année, il ne peut laisser indifférent dans un sens comme dans l’autre. Et je dois avouer que je suis passé par plusieurs états d’esprit à son écoute.

 

Lors des premières, ça a vraiment été une déception. J’adore les morceaux d’ouverture des Canadiens « Mate Ka Moris » sur Today’s Empires, Tomorrow’s Ashes ou « A speculative fiction » sur Potemkin Limits pour n’en citer que deux et, ici, At Peace démarre avec Guiding Lights qui amène de l’intensité et une belle tension mais n’explose jamais, il faut donc attendre At Peace pour que Propagandhi renoue avec ce que j’aime : ce côté agressif, explosif et une belle énergie. Cat Guy s’en sort aussi pas mal avec des riffs abrasifs mais la suite se révèle mièvre et finalement peu emballante. Ces premières sessions se sont donc révélées décevantes.

 

Je dirais que Propagandhi n’est pas un groupe qui a l’habitude de décevoir et de rater un album. Certes le précédent (victory lap) était un ton en dessous mais il reste, pour moi, un bon album. Alors on remet le disque encore et encore, et puis il y a un petit déclic et il me ramène indéniablement vers lui.

 

Et sur cette deuxième salve d’écoutes à haute dose il y a énormément de choses qui ressortent. Tout d’abord la première moitié de l’album est vraiment très bonne si on accepte le fait que les canadiens ne fassent pas ce qu’ils ont déjà joué par le passé. Le riff sur Guiding Lights est extraordinaire, At peace est aussi un morceau superbe, peut-être, et même certainement, dans le top 10 du groupe tandis que Cat Guy et son intro très martiale fait preuve de mélodies très pointues, ce même côté mélodique est énormément présent sur No Longer Young, moins bon peut-être mais non dénué de charme. Rented P.A. est peut-être moins intéressant mais la guitare révèle un côté métal super sympa, et puis son pont en plein milieu est juste magique. Autre point important on trouve des accords, des riffs très techniques qu’on n’entend pas habituellement dans ce registre de groupes.

Et puis à force d’écoutes je dois avouer que mon jugement s’est affiné. Son principal défaut est certainement sa longueur car avec 48 minutes et de nombreux morceaux moins qualitatifs sur sa deuxième partie (Fire season, day by day) il perd énormément en impact. Je pense qu’il aurait mérité ne pas dépasser les 35 minutes pour vraiment être percutant.

 

Mais on ne peut pas que parler de musique avec Propagandhi, il faut absolument aborder les textes et les thématiques abordées. Et le groupe semble désillusionné voire même résigné, Le thème des états autoritaires et fachistes est mis en avant sur Benito’s earlier Work qui tire son nom de Benito Andrea Mussolini. C’est un peu la même idée sur Vampires are real mais il parle de la mainmise des puissants sur les Etats. Tandis que no longer young approche le vieillissement et le déclin de nos sociétés occidentales. Rented PA aborde la manipulation de l’opinion public à travers les discours politiques en lien direct avec le gouvernement Trump. Et puis Guiding Lights met la lumière sur cette recherche de sens que l’on ressent dans une société qui perd tous ses repères.

 

 

Avec 35 années de carrière, Propagandhi signe ici son album le plus atypique. Le groupe a toujours évolué et At Peace se veut le plus calme et le plus mesuré. Il reflète l’état d’esprit très résigné des canadiens en apposant une tension à ses morceaux. Le fait d’avoir ralenti le rythme et délaissé les titres puissants est audacieux et cela ne plaira pas à tout le monde mais, pour ma part, avec un très grand nombre d’écoutes, je dois avouer que j’aime beaucoup certains morceaux et notamment la première partie de cet album.

 

 

J. NeWSovski

 

 

 

https://propagandhi.bandcamp.com/album/at-peace

https://propagandhi.com/

https://www.facebook.com/Propagandhi/



mercredi 4 juin 2025

TIEBREAK – Hardcourt [EP]

 


TIEBREAK – Hardcourt [EP]

À tant Rêver Du Roi

 

C’est près d’Angoulême qu’est né Tiebreak, groupe passionné de tennis emmené par Richard Juge, qui fait le chant, la guitare et la basse tandis que Matgaz s’est chargé de la batterie en studio. Pour le live Richard s’est entouré d’autres musiciens dont notamment Manu et Romain de W!ZARD. Le groupe alterne entre indie rock, noise voire post-rock.

 

Trop court pour être un album (17 min), un peu long pour être un EP, Hardcourt est un format hybride qui se révèle plutôt intéressant. Tiebreak entame avec panache son match avec The Court à la guitare abrasive et aux faux airs de Sparta. Matchpoint enchaîne et alterne passages mélodiques et sonorités noises. La puissance de TieBreak s’exprime parfaitement dans RAM avec une énergie communicative et son gimmick à la guitare vraiment irrésistible. Richard amène de la lourdeur avec Pigs, très noise qui me fait un penser, sur son intro, à Unsane.

 

Enregistré à La Nef et mixé par Oli Simpson, Hardcourt bénéficie d'une production très propre.

 

TIEBREAK signe donc un premier opus très intéressant qui se révèle assez facile d’accès tout en gardant un côté indie underground plaisant. Affaire à suivre !

 

 

J. NeWSovski

 

https://www.facebook.com/tiebreaktheband/

https://tiebreakband.bandcamp.com/album/hardcourt

 



vendredi 30 mai 2025

HATEFUL MONDAY - The Great Nothing

 


HATEFUL MONDAY - The Great Nothing 

Kicking Records

 

Allez c’est parti pour un petit tour en Suisse avec les punkers d’HATEFUL MONDAY, qui sortent d’un conclave d’un peu moins de 4 ans depuis leur 2 titres « The Freak Parade » qui permettait de présenter aussi leur nouveau line-up. Reverend Seb et son équipe nous reviennent avec un nouvel album « The Great Nothing ».

Avec un réel savoir-faire et plus de 25 ans d’expérience. On avait déjà eu le droit à un petit aperçu en Juin de l’année dernière avec la sortie du titre « Midlife Crisis Social Club » qui figure également sur cet opus et qui montre que le groupe a gardé un vrai goût pour les mélodies, la vitesse et l’efficacité.

 

On rentre vite dans le vif du sujet dès l’ouverture de cet album avec du pur HATEFUL MONDAY dans le style et l’enchainement des morceaux au rythme bien soutenu « Pure State of the Quantum System », « The Sum of our Parts », « The Great Filter ».

Puis arrive un morceau comme « The Things That Could & Should Have Been » qui laisse la part encore un peu plus aux mélodies.

 

Petits coups de cœur pour « We Are All The Sons & Daughters of Lamarck & Schopenhauer » avec son intro et son orchestration ajoutée d’orgue, « The voice of Opposition » avec ses voix féminines pour le refrain et « Tofu Fighters (Learn to Fry) » pour le titre fun et surtout son riff très accrocheur aux sonorités plus hardcore.

 

Cette messe se termine par un petit prêche acoustique « Antitheist » pour quitter l’église en douceur.

 

Ce dernier album de 14 titres s’écoute avec énormément de plaisir et rentre vite dans la tête. On ne peut pas dire qu’HATEFUL MONDAY révolutionne le style avec ce nouvel EP. En revanche, il est certain qu’ils le font très très bien comme de véritables artisans du skatepunk de la scène européenne.

 

Herr Krombacher

 

https://hatefulmonday.bandcamp.com/album/the-great-nothing

https://www.facebook.com/hatefulmonday/

 


BONUS

 

« Midlife Crisis Social Club » https://youtu.be/dgYBmaJgb30?si=mGMRdvLC45iK5I24

''The Sum Of Our Parts'' https://youtu.be/AE3pmD-IUyc?si=0sQ1rUr-xynqDGTp

''Last Words'' https://youtu.be/Kd1ORbUDGJE?si=LOgTEZx4GihvR0Fo

lundi 26 mai 2025

LOGGERHEADS – Enjoy [EP]

 


LOGGERHEADS – Enjoy [EP]

Autoproduction

 

Loggerheads (« en opposition » ou  « têtus » en français) est un groupe de Rodez dans l’Aveyron dont on avait déjà entendu parler au moment de son split avec Enloc mais qui a aussi à son actif un album et deux autres EPs. Cela fait une dizaine d’années qu’il tourne et vous l’avez peut-être déjà croisé en première partie de groupes comme Uncommonmenfrommars, Heavy Heart, Dirty Fonzy ou No Guts No Glory.

 

Dès les premières notes de Here We Are, on est happé par une urgence communicative, morceau est rythmé et les riffs sont tranchants. As Long enfonce le clou avec des paroles qui résonnent comme un manifeste : "as long as it is possible, we will continue to shout loud". Il sonne un peu à la Dirty Fonzy avec des passages bien bondissants. How Can We Get There? aborde des thématiques plus sombres, questionnant notre rapport à l'environnement et à la société de consommation, le tout avec une basse qui mène bien la danse. Mais c'est avec Youthfulness que le groupe nous offre un clin d'œil plein d'autodérision, évoquant leurs débuts et cette envie irrépressible de monter sur scène, encore et toujours. Enjoy pose le dernier clou avec un punkrock rapide et toujours aussi frais.

 

Les cinq titres ont été enregistrés chez Flantier records à Ricaud par Etienne Soulier. Le son est correct mais sans plus, il manque d’un peu de tonus et de puissance je trouve.

 

Loggerheads est donc une découverte sympa avec un punkrock frais qui ne révolutionnera certes pas le style mais qui pose les choses proprement avec des mélodies accrocheuses.

 

J. NeWSovski

 

 

 

https://loggerheads.bandcamp.com/

http://www.loggerheads.fr/

https://www.facebook.com/profile.php?id=100048194231978#



jeudi 22 mai 2025

YOUR NEW FAVORITE TAPE – Twenty years too late

 


YOUR NEW FAVORITE TAPE – Twenty years too late

Autoproduction

 

Attention voici un groupe dont le nom va pas mal circuler dans les années à venir : Your new Favorite Tape. On va le raccourcir en YNFT, parce que leur patronyme est très long à dire, mais toujours est-il que le groupe joue un punkrock très rapide emplein de références des années 90/ 2000. En clair c’est la période que je préfère, celle qui a bercé mon adolescence et qui berce, encore et toujours, mes oreilles. Comme beaucoup de monde je connais par cœur la plupart des albums sortis sur Fat Wreck Chords, Epitaph, Burning Heart… et ça fait toujours plaisir 30 ans après de voir que le style n’est pas mort et que des groupes perpétuent la tradition.

 

YNFT, c’est avant tout l’histoire de deux vieux potes, Guiggy et Pedro qui ont décidé de rebrancher leurs guitares pour, avant tout, se faire plaisir, ils se sont rapprochés de Benny de Exit Wounds à la basse et de Jérémie de Dolorès Riposte à la batterie.

 

Les Parisiens possèdent plusieurs cordes à leur arc, se révélant mélodiques et accrocheurs sur Graduated avec son refrain très pop. Mais ils se montrent aussi plus lents et posés sur la balade S.A.M, qui est un très joli morceau. YNFT possède des faux airs de No Use For A Name sur No Comply Impossible et Sick Of You, l’un des morceaux les plus efficaces de ce premier album. Il révèle aussi un côté Blink 182 aussi sur Monday Song. Le quatuor s’implique avec beaucoup de sincérité sur the sun will rise dont le texte parle des attentats du 13 novembre et plus précisément le Bataclan. YNFT sait accélérer quand il faut avec des morceaux bien foutus comme Dead For Sure et The Change, mais loin d’être que du rentre dedans il joue aussi avec la finesse comme sur Music Box. On appréciera aussi la petite introduction au joli jeu de mot et aux sonorités métalliques : Hell-O.

 

 

S’inspirant du schéma punkrock mélodique de la fin des années 90, YNFT amène une touche moderne avec des riffs de guitares parfois plus agressifs, tout en apportant une réelle touche powerpop appréciable.

 

 

J. NeWSovski


https://www.yournewfavoritetape.com/

https://yournewfavoritetape.bandcamp.com/album/twenty-years-too-late

 


dimanche 18 mai 2025

//LESS - Crawl in the Blur

 


//LESS - Crawl in the Blur

A Tant Rêver du Roi

 

Nouvelle signature du très inspiré label palois A Tant Rêver du Roi, //LESS va ravir les amateurs de noise-rock qui tabasse. Avec une économie de moyens (2 basses, 1 batterie, et oui la guitare est restée au placard), les Tourangeaux franchissent régulièrement le mur du son. C'est en arpentant les scènes (une centaine de concerts au compteur quand même !) que //LESS a trouvé son style qui navigue entre post-punk rugueux, noise-rock et expérimentations bruitistes. Le trio avait également pu se faire la main en 2023 avec un premier EP prometteur. Il transforme l'essai avec un premier album "Crawl in the Blur" composé de 12 titres dévastateurs. La puissance de feu de //LESS est déjà bien en place sur l'introductif "That Kind of Man". Brutal tout en étant finalement accessible, ce titre fait penser à METZ. Comme chez les Canadiens, on y trouve un riff imparable, un déluge de larsens, un petit penchant indus et un chant parfois hurlé qu'on croirait venir du fond du garage. Tout aussi intense et bruitiste "Bury the Pig est une véritable petite bombe noisy. Le son est tranchant, l'équilibre entre la basse saturée et celle plus groovy est parfait. Le jeu de batterie très physique fait également forte impression. Le combo tourangeau n'offre aucun répit, la 3eme salve arrive très vite. Un son de basse très "bleachien", "Burn" nous ramène effectivement à la fin des années 80 et au début de NIRVANA. 5 minutes de sauvagerie et de hargne qui nous scotchent littéralement. //LESS accélère la cadence et fait preuve d'une belle énergie punk sur l'expéditif "Stress Place". Le noise-rock torturé de "Disappear" fait mouche avec son refrain accrocheur, sa rythmique robotique et son final noisy. On reprend notre respiration sur la douce intro de "My Sentence". Mais très vite le gros son de basse et les décibels font leur retour. Le chant semble parfois sortir d'un porte-voix. Malgré la tension, ce morceau se révèle finalement assez catchy grâce à certaines parties vocales accrocheuses. Les Tourangeaux poussent encore un peu plus loin les expérimentations sonores sur le titre éponyme "Crawl in the Blur" ou sur l'exigeant "The Reason". Un gimmick noisy imparable jalonne le heavy et schizophrénique "Make Them Bleed". Une nouvelle déflagration qui associe cette fois-ci GODFLESH à METZ. Le trio magique ne relâche pas la pression. "The Pill" et "Joy is Sad" semblent gagner encore un peu plus en sauvagerie. "Can't Run Away From Myself", barré et jubilatoire, conclut parfaitement l'album : intense, truffés de changements de rythme et d'explosions de larsens, du //LESS pur jus. 


Avec "Crawl in the Blur", //LESS signe un premier album viscéral, tendu, sans compromis. Un concentré de fureur et de maîtrise qui confirme tout le bien qu’on pensait d’eux après leur EP. Le noise-rock made in Tours a trouvé ses nouveaux ambassadeurs. Il nous tarde de les découvrir sur scène.

Mr Caribou

 

Titre préféré :                    Disappear

 

https://lessmusic.bandcamp.com/album/crawl-in-the-blur

https://linktr.ee/Lesstheband